Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/196

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fistes, Allemands déguisés, qui prétendaient poursuivre leur jeu en temps de guerre, au risque d’énerver un peuple fatigué et de nous déposséder du fruit coûteux de la victoire. Le propre des grands hommes est d’être calomniés ; Brissot était assez fort pour ne pas se laisser assombrir par l’injustice. Il en riait, de ce plein rire gaulois, que ses admirateurs comparaient à celui de Danton : (rapprochement déplacé ! car Brissot n’avait point, disons-le, ce style de la Halle et ce ton débraillé). — Enfin, il était sans rancune, et prêt à obliger, demain, ses ennemis. L’essentiel était qu’il les eût roulés.

Tout s’achète ici-bas. Brissot paya, au foyer, sa fortune politique. Il n’était pas heureux dans sa vie domestique. La femme qu’il avait épousée, riche, blanche, grasse, anémique, une poularde truffée de bonnes valeurs en banque, était, à tous points de vue, pour un homme comme Brissot, une compagne insuffisante. Elle était de peu de ressources, de l’esprit comme des sens. Dénuée de personnalité, et malheureusement aussi sans la compensation qu’offre ce dénuement chez certaines nullités, de savoir s’effacer, elle encombrait l’horizon de son inexistence. Elle se plaignait,