Page:Rolland - Les Précurseurs.djvu/105

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
101
LES PRÉCURSEURS

de l’arrière. Dès à présent, leur parole commence à s’élever, singulièrement âpre et vengeresse ; le livre puissant de Barbusse en est un formidable témoignage.

Voici d’autres témoignages de soldats, moins connus, mais non moins émouvants. Aucun n’est inédit. Je me suis fait une loi de n’user, pendant la guerre, d’aucune confession orale, ou écrite, que j’aie personnellement reçue. Ce que mes amis, connus ou inconnus, me confient, est un dépôt sacré, dont je ne ferai emploi que s’ils me le permettent, et quand les conditions le leur permettront. Les témoignages que je reproduis ici ont été publiés à Paris, sous l’œil d’une censure, cependant rigoureuse pour les rares journaux qui sont restés indépendants. C’est une preuve que ce sont là choses connues, qu’il est inutile ou impossible de voiler.

Je laisse parler ces voix. Toute appréciation est superflue. Elles sonnent assez clair.

De Paul Husson : L’Holocauste (Paris, collection de « Vers et Prose », F. Lacroix, 19, rue de Tournon ; — achevé d’imprimer, 10 janvier 1917.) — C’est le carnet d’un soldat d’Île-de-France, qui « part sans enthousiasme, haïssant la guerre et si peu guerrier. Soldat, il fit ce que chacun fit ».

P. 19 : « Au nom de quel principe moral supérieur ces luttes nous sont-elles imposées ? Pour le triomphe d’une race ? Que reste-t-il de la gloire des soldats d’Alexandre ou de César ? Pour lutter ainsi, il faut croire. Croire que l’on combat pour la cause de Dieu, d’une grande justice, ou aimer la guerre. Nous ne croyons pas ; nous n’aimons ni ne savons faire la guerre. Et pourtant, des hommes se battent et meurent qui ne