Page:Rolland Handel.djvu/24

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ment. Ce n’est pas le tout d’amorcer ces mouvements colossaux d’armées qui marchent et qui dansent ; il faut avoir les reins assez solides pour porter l’édifice, sans plier, jusqu’au bout. Zachow fléchit en route, il n’a pas la force vitale de Hændel. Mais en revanche, il a plus de naïveté que lui, plus de candeur tendre, un je ne sais quoi de chaste et de rougissant, une grâce évangélique[1].

C’était bien là le maître qu’il fallait à Hændel, le maître que plus d’un grand homme a eu le bonheur de trouver — (c’est Giovanni Santi pour Raphaël, c’est Neefe pour Beethoven) : — bon, simple, clair, un peu pâle, une lumière égale et douce, où l’adolescent rêve en paix, s’abandonnant avec confiance au guide presque fraternel, qui ne cherche pas à le dominer, qui cherche bien plutôt à nourrir de sa petite flamme un plus vaste foyer, à verser son ruisseau de musique dans le grand fleuve du génie.

Pendant qu’il était encore à l’école de Zachow,

  1. Certaines phrases très simples, comme, dans la cantate pour la Visitation : Meine Seel erhebt den Herren, le récitatif du soprano : « Denn er hat seine elende Magd angesehen » (p. 112), ont une odeur exquise d’humilité virginale qui ne se retrouverait plus chez Hændel.