Page:Rouquette - Meschacébéennes, 1839.djvu/81

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Et comme un père aimant, ô vieux fleuve créole,
Tu sembles écouter et ta voix nous console…..
Hélas ! naguère encor, sur ta rive, attristé,
Tu me vis seul, errant pleurant ma liberté,
Pleurant mes jours heureux, l’indépendante vie
Du jeune homme qui court où le pousse l’envie,
L’impérieux besoin, l’instinct capricieux
De voyager, de voir toujours de nouveaux cieux,
Pleurant mes jours passés et mes heures d’étude,
De doux recueillement, de sainte solitude,
Et maudissant l’amour, ce corrosif poison,
Et l’œil vers l’Orient, fixé sur l’horizon,
Loin de ce grand Paris que mon cœur redemande,
Comme un aigle enchaîné..................
Toi seul me consolais, vieux fleuve ; à mes sanglots
Tristement répondaient tes sympathiques flots.
Ta paternelle voix endormait ma tristesse.
Et je disais alors : Souvenirs de Lutèce,
Loin de moi ! loin de moi ! Pourquoi courir les mers ?
Se préparer encor tant de regrets amers ?
Non !….la raison me dit qu’il est temps d’être sage,
Serai-je donc toujours un oiseau de passage ?
Comme l’algue des mers qu’entraîne au loin le vent,
Dois-je sans cesse errer sur l’abîme mouvant ?
Me verra-t-on toujours, loin de ma Louisiane,
Flotter sur l’Océan, voyageuse liane ?