Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t11.djvu/259

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

à sa subsistance, & pourquoi, ayant d’autres talens qu’il pouvoit employer plus utilement pour lui-même & pour le public, il s’étoit attache de préférence à celui-là ? Pour abréger ces recherches sans manquer à mes engagemens envers vous je marquai naturellement ma curiosité, & sans lui dire tout ce vous m’aviez appris de son opulence, je me contentai de lui répéter ce que j’avois oui dire mille fois, que du seul produit de ses livres, & sans avoir rançonné ses libraires, il devoir être assez riche pour vivre à son aise de son revenu.

Vous avez raison, me dit-il, si vous ne voulez dire en cela que ce qui pouvoit être ; mais si vous prétendez en conclure que la chose est réellement ainsi & que je suis riche en effet, vous avez tort, tout au moins ; car un sophisme bien cruel pourroit se cacher sous cette erreur.

Alors il entra dans le détail articule de ce qu’il avoit reçu de ses libraires pour chacun de ses livres, de toutes les ressources qu’il avoit pu avoir d’ailleurs, des dépenses auxquelles il avoit été force pendant huit ans qu’on s’est amuse à le faire voyager à grands frais, lui & sa compagne aujourd’hui sa femme, & de tour cela bien calcule & bien prouve il résulta, qu’avec quelque argent comptant provenant tant de son accord avec que l’Opéra que de la vente de ses livres de botanique & du reste d’un fonds de mille écus qu’il avoit à Lyon & qu’il retira pour s’établir à Paris, toute sa fortune présente consiste en huit cents francs de rente viagère incertaine, & dont il n’a aucun titre, & trois cents francs de rente aussi viagère mais assurée, du moins autant que la personne qui doit la payer sera solvable. "Voilà très-fidellement, me dit-il,