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Dhaumya, leur purohita au chapelain domestique, cheminait, une touffe d’herbe kuça dans la main, et récitant des sâmans[1] redoutables qui se rapportaient à Yama[2]. Il ajouta que le prêtre tenait la pointe de cette herbe tournée vers le sud-ouest, la région consacrée à Nirṛti, le génie de la Mort, et qu’il disait en marchant : « Les Bharatas, une fois tués dans le combat, les gourous des Kurus chanteront les sâmans »[3].

De sinistres présages avaient signalé le départ des Pâṇḍavas : des flammes extraordinaires s’étaient allumées dans un ciel sans nuage, la terre avait tremblé ; Râhu avait dévoré le soleil, bien que ce ne fût point son jour[4]. Des météores étaient tombés à gauche de la ville[5]. Des chacals, des vautours, des corbeaux, tous animaux carnassiers, troublaient de leurs clameurs les temples, les sanctuaires, les palais et les places publiques[6]. Vidura conclut en disant à son frère que ces présages effrayants annonçaient la destruction des Bharatas, fruit de ses mauvais conseils[7]. C’est que les rois, plus que les autres hommes, sont tenus à surveiller leurs moindres gestes, à cause de l’importance que leur donne l’éminente situation qu’ils occupent.

Dhṛtarâṣṭra n’était cependant pas un impie. À sa cour, les rites religieux prescrits pour chaque jour étaient scrupuleusement observés[8]. Mais il était loin d’avoir

  1. Mantras ou formules sacrées, empruntées à la collection du Sâma Veda.
  2. Id. 8.
  3. Id. 22 et 23.
  4. Un jour d’éclipse. On connaît le mythe de Râhu, nous en avons parlé précédemment.
  5. Littéralement « laissant la ville à droite ».
  6. Id. 28-30.
  7. Id. 31.
  8. LVIII, 35.