Page:Roussel - Idées religieuses et sociales de l’Inde ancienne.djvu/63

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par tous ces impairs, l’accablait de quolibets. Ainsi, les héros de nos vieilles épopées françaises avaient le rire gros et facile ; les Pâṇḍavas, comme eux, aimaient à gâber.

« Sahadeva riant me criait sans cesse : Par ici la porte, ô prince, va de ce côté. Alors Bhîmasena, me raillant à son tour, disait : Fils de Dhṛtarâṣṭra, ô roi, la porte est là »[1].

L’heureux sort des Pâṇḍavas remplissait Duryodhana de jalousie et de haine[2] ; il en convenait lui-même devant Çakuni, son oncle :

« À la vue d’une prospérité aussi éclatante, chez Yudhiṣṭhira, je me sens rongé par une envie que je ne connaissais pas »[3].

L’existence lui en était devenue à charge, ainsi qu’il l’avouait encore au roi du Gandhâra.

« Je me précipiterai dans le feu, j’avalerai du poison, ou je me jetterai à l’eau, car je ne puis plus supporter la vie »[4].

D’ailleurs, il estimait que nul ne saurait se résigner à voir un ennemi prospérer, pas même une femme, pas même un eunuque[5].

Çakuni à qui l’infortuné faisait une telle confidence essaya de le réconforter. Cette fortune au sommet de laquelle étaient parvenus les Pâṇḍavas, il se chargeait de la renverser. Le moyen était bien simple :

« Le fils de Kuntî aime les dés, bien qu’il ne sache pas jouer. Or un roi provoqué aux dés ne peut pas refuser. Pour moi, je connais les dés ; je n’ai pas mon pareil sur la terre, non pas même dans les trois mondes »[6].

  1. L. 25 et seq. Cf. XL VII, 5 et seq.
  2. XLVII, 16.
  3. Id. 29.
  4. XLVII, 31.
  5. Id. 33. Cf. L, 17.
  6. XLVIII, 19 et 20.