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contraire, être rapportés à la dépravation des humeurs, aux mauvaises qualités de l’air, des alimens & de la boisson, aux exercices outrés, au trop grand repos, & au long séjour dans les écuries mal-saines & mal construites. M. T.

Charbon des Moutons, Médecine vétérinaire. Cette maladie est enzootique, & paroît particulière aux moutons & aux brebis de certaines provinces, telles que la Provence, le Languedoc & le Roussillon.

Elle est quelquefois compliquée avec la clavelée, (Voyez ce mot) ce qui la rend presque toujours mortelle. Elle se manifeste d’abord sur ces animaux, aux parties dénuées de laine, telles que le ventre, l’intérieur des cuisses, des épaules, au col & sur les mamelles, par un gros bouton dur & âpre, dont le centre est noir, qui fait bientôt des progrès sensibles, & parvient à la grandeur d’un écu de six livres, & même plus. Vers le milieu, & tout autour de cette tumeur enflammée, il s’élève des vessies remplies d’une sérosité âcre, caustique, qui, en coulant, fait l’effet d’un corrosif sur les tégumens, & communique le mal aux parties voisines ; quelquefois les environs de cette tumeur sont de couleur livide, & donnent des marques visibles de la gangrène. Ce mal est toujours contagieux parmi les moutons, & rarement il est sans fièvre ; le plus souvent il en est accompagné, & lorsque cela arrive, l’animal est abattu, dégoûté, ne rumine plus, & meurt quelquefois le second jour ; la mort arrive surtout lorsque le charbon s’affaisse tout à coup, ou qu’il fait des ravages dans l’intérieur de l’animal.

Le danger de ce mal est relatif à l’intensité des symptômes, sur-tout de la fièvre, & à la partie qui en est attaquée. Plus le charbon est éloigné du centre ou des parties essentielles à la vie, moins il est dangereux.

Le peuple des environs de Perpignan attribue la cause de cette maladie à l’usage des eaux dans lesquelles les perdrix ont bu, & s’imagine que lorsque les moutons vont boire après elles dans quelque fosse où l’eau a séjourné quelque temps, c’est alors qu’on l’observe dans les troupeaux. Cette opinion est un préjugé populaire sans fondement ; mais il y a apparence que la vraie cause de ce mal existe ou dans les eaux corrompues, ou dans les herbes chargées de quelque principe vénéneux.

Lorsque le charbon se manifeste, il faut le scarifier avec un bistouri ou un canif, pour le faire dégorger & empêcher les progrès de la gangrène ; le cerner ensuite avec l’esprit de vitriol, ou le beurre d’antimoine, & étuver la partie avec de l’eau-de-vie camphrée, ou bien avec une décoction de rue ou de quinquina, ou une infusion de sabine, & de sauge saturée de sel ammoniac, dans du bon vin ; toucher toutes les parties livides avec l’esprit de vitriol, faciliter la chute de l’escarre avec du beurre ; & l’escarre tombée, panser la plaie avec le digestif ordinaire ; laver toujours la plaie à chaque pansement avec du vin chaud ; donner dans le cours de la maladie, si la fièvre n’est pas forte, des breuvages de deux drachmes d’extrait de genièvre, dans un verre de vin, & terminer la cure par un purgatif de