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d’exemption des droits de franc-fiefs pour tous les terreins défrichés ; & s’il est établi dans l’étendue desdits défrichemens des églises paroissiales, ou des paroisses succursales, il ne sera payé aucun droit d’amortissement, pour raison de ces établissemens.

IV. Tous les actes qui seront passés pendant le même espace de quarante années par les propriétaires des terres incultes, leurs successeurs, cessionnaires ou ayans cause, soit entr’eux ou avec d’autres particuliers, pour raison des défrichemens, seront contrôlés, sans qu’il puisse être exigé autres ni plus grands droits de contrôle, que dix sols pour chacun acte, de quelque nature ou espèce qu’il soit.

V. Et dans le cas où quelques-uns des actes mentionnés à l’article précédent donneront ouverture aux droits d’insinuation, centième & demi-centième denier, ces droits ne seront payés que sur le pied seulement d’un denier par arpent, sans néanmoins qu’ils puissent être perçus pour les baux de vingt-neuf ans & au-dessous, conformément à l’article de la déclaration du 13 août 1766.

VI. Les colons & autres personnes employées aux défrichemens, seront taxés à la capitation par les sieurs intendans & commissaires départis dans les provinces & généralités du royaume, à raison de vingt sols seulement par chacun. Enjoint Sa Majesté, auxdits sieurs intendans & commissaires, départis, de tenir la main à l’exécution du présent arrêt, qui sera imprimé, publié & affiché par-tout où besoin sera. Fait au conseil d’état du roi, Sa Majesté y étant, tenu à Versailles le deuxième jour d’octobre 1766.


CHAPITRE II.

Examen des avantages & désavantages des Défrichemens.


Si les défrichemens augmentent le nombre des citoyens, & sur-tout s’ils augmentent celui des tenanciers, il n’est pas douteux qu’ils soient d’un avantage inappréciable ; mais s’ils servent uniquement à multiplier les terres labourables, ils ne produisent plus aucun effet ; au contraire, ils préjudicient à la bonne culture de celles qui existent déjà : ces idées paroîtront paradoxales, au premier coup-d’œil, à celui qui, du fond de son cabinet, juge de l’agriculture du royaume. Entrons dans quelques détails.

On se plaint dans toutes nos provinces que les bras manquent ; que les arts, ou de nécessité première, ou de luxe attirent les habitans des campagnes dans les villes : la quantité étonnante de paysans qui s’y jette pour y augmenter la classe la plus méprisable de tous les hommes, celle des laquais, finit par les dépeupler : un seul coup-d’œil sur les provinces voisines de la capitale, offrira la preuve la plus convaincante de ce que j’avance. C’est une race perdue : ayant une fois bu dans la coupe empoisonnée des grandes villes, ils oublient le lieu qui les vit naître. Le soldat, au contraire, gagne à sortir de son pays ; il y revient presque toujours, & rapporte avec lui des idées de cultures différentes de celles de son canton, & souvent on lui doit des révolutions heureuses, dont je pourrois citer plusieurs exemples. Si, d’après un aveu arraché à la vérité & au besoin, les bras