Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/243

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d’animaux dans les écuries, dans les étables, dans les bergeries, &c., en éloigner avec le plus grand soin tout ce qui peut infecter, & veiller à la plus grande propreté. C’est en renouvelant l’air qu’on chassera les exhalaisons pernicieuses. Pour y réussir, on s’attachera à procurer une issue à l’air intérieur, & à donner entrée à l’extérieur. On ouvrira les portes & les fenêtres ; on corrigera les exhalaisons putrides, en faisant, plusieurs fois par jour, bouillir du vinaigre, brûler des aromates, & sur-tout enflammer du nitre sur des charbons ardens.

Si ces premiers secours sont insuffisans, & que l’air fixe ait commencé à se dissiper, & qu’il ait déjà excité un mouvement intestin de putréfaction dans les fluides, ceux-ci étant corrompus ont déjà affoibli le tissu, le ressort des solides, & altéré leur cohésion. Pour y remédier, il faut rendre l’air fixe, &, pour produire cet effet, recourir aux antiseptiques externes proprement dits. Ces remèdes sont tous tirés des substances résineuses ou gommo-résineuses, qui contiennent beaucoup d’air fixe, fermentent très-longtemps, lorsqu’elles sont mêlées avec des substances animales putrides, & par cette raison conviennent dans tous les cas où l’on observe un état putride dans une partie externe, quelle qu’en soit la cause. Aussi l’observation journalière apprend-t-elle que dans ces circonstances on se sert avec succès des décoctions ou infusions d’aristoloche, d’iris de Florence, de zédoaire, d’ailliaire, de scordium, d’abrotanum, d’absente, de menthe, de camomille, &c., avec lesquelles on fomente la partie malade ; que l’esprit de vin camphré, les teintures de myrrhe, d’aloès, &c. mêlées avec les infusions & les décoctions appropriées, sont encore très-efficaces, employées en fomentations ; mais que rien n’égale la vertu antiseptique de la décoction de quinquina. De simples fomentations seroient cependant insuffisantes dans les ulcères putrides : il faut les couvrir de plumaceaux chargés d’onguent de stirax, & trempés dans quelques-unes des liqueurs ou des décoctions désignées ci-dessus, & sur-tout dans la décoction de quinquina. Mais si l’état de putridité vient d’une cause interne, il est à propos d’employer en même temps les antiseptiques internes, proprement dits : ils sont même quelquefois très-utiles dans les putridités externes, de même que les purgatifs, sur-tout si les animaux malades respirent un mauvais air, & principalement s’ils y mangent, parce qu’ils avalent une grande quantité de miasmes putrides qui corrompent les sucs & les matières contenues dans les premières voies, & disposent à la gangrène.

Les remèdes antiseptiques ne sont pas toujours assez puissans pour rétablir dans un état sain une partie absolument putride : ils corrigent la putridité, ils en arrêtent les progrès, & rendent peu à peu aux vaisseaux leur force & leur mouvement oscillatoire, aux humeurs, leur consistance ; ils font naître autour de la partie putride une inflammation suivie d’une suppuration, à l’aide de laquelle tout ce qui ne peut pas être rétabli dans un état sain est séparé & défense. C’est ce qu’on observe journellement dans les états gangreneux.