Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/271

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rier sert de pinacle. Au-dessous, l’espace sombre est peint en bleu foncé parsemé d’étoiles. La statue est sculptée avec rudesse, mais vue à distance, elle paraît délicate et même supérieure. Le chevalier porte sa cotte de mailles ; seuls le visage et les mains sont nus. Le haubert et le casque sont en maillons de métal, l’armature des jambes est en lames d’acier. Le mort porte, par-dessus sa cotte de mailles, une tunique serrée à la poitrine et garnie d’étroites bandes brodées. Sa dague est à sa droite ; sa longue épée, à sa gauche ; ses pieds reposent sur un chien (ce chien figure aussi sur son cimier) qui regarde son maître. La tête de la statue, au lieu d’être, comme d’habitude , légèrement tournée vers le spectateur, regarde la profondeur de l’arceau où est sculptée une image de saint Joseph portant le Christ enfant. Le guerrier semble avoir eu, au moment de la mort, la vision du Christ et être retombé paisiblement sur son oreiller en gardant ses yeux tournés vers lui et ses mains jointes pour la prière.


De l’autre côté de la chapelle est le charmant tombeau de Duccio degli Alberti, ambassadeur florentin à Venise : celui-ci est surtout remarquable comme étant le premier sur lequel, à Venise, apparaissent les Vertus. Nous y reviendrons tout à l’heure, après avoir noté les autres tombeaux vénitiens qui appartiennent à cette parfaite époque.

Le plus intéressant, sinon le plus travaillé, est celui du grand doge Francesco Dandolo dont les cendres auraient dû être trouvées assez honorables pour être gardées chez les chanoines dei Frari où elles avaient été déposées tout d'abord. Mais, comme s’il n’y avait pas eu assez de place pour contenir les quelques papiers du couvent, les moines, ayant besoin d’une chambre d' « Archives »,