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ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

sache pas qu’elle nous soit ainsi parvenue parmi les miniatures nombreuses des manuscrits. Ce qui est certain, c’est qu’au 16e siècle un des grands artistes de cette époque favorisée ne dédaigna pas de rajeunir sous son pinceau le Miracle de Théophile[1]. On lit dans l’histoire de Nancy, par l’abbé Lionnois, tome I, page 234 :

« Dans la chapelle de la Conception de la paroisse de Saint-Epvre on aperçoit un tableau de 15 pieds de hauteur sur 12 de largeur, peint à l’huile sur un mur de pierres de taille : il contient six traits singuliers de dévotion envers la sainte Vierge, sans aucune confusion dans l’ensemble, quoique les sujets soient des plus disparates. Outre l’avantage qu’il a d’être un des plus anciens tableaux de quelque mérite qui se soient conservés dans la province, il a encore celui de faire connaître, avec le goût du temps, la protection que nos anciens ducs ont toujours accordée aux artistes étrangers, qu’ils ont eu soin d’attirer à grands frais dans leurs états. L’auteur de cet ouvrage est Léonard de Vinci, italien, qui a fait aussi la cène du réfectoire du couvent des Cordeliers. On y a attaché des pattes et des lattes pour orner le mur de tapisseries les jours de solennités. On a fait pis : on l’a couvert en entier d’un blanc de chaux pour en cacher la peinture. J’ai fait enlever cette chaux, et j’ai vu avec plaisir que, malgré tous ces efforts pour anéantir ce bel ouvrage, il conserve encore un air de fraîcheur. Les couleurs se sont maintenues, le dessin en est régulier, et la plupart des figures sont achevées. Il a été fait au commencement du règne du duc Antoine, contemporain de François Ier, restaurateur, en France, des sciences et des arts.

« Au haut et dans le milieu de ce tableau on aperçoit une Vierge portée sur les nues, ayant une couronne sur la tête, tenant de la main droite sur ses genoux l’enfant Jésus, qui paraît tendre les bras à tous ceux qui implorent

  1. Un de nos jeunes archéologues les plus zélés, M. Didron, m’apprend qu’il a vu la légende de Théophile peinte sur verre dans les cathédrales de Laon, du Mans et de Troyes.