Page:Sénèque - Œuvres de Sénèque le philosophe, Tome 2, trad Baillard et du Bozoir, 1860.djvu/401

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conomie, sans laquelle les plus grandes richesses ne suffisent pas, et avec laquelle on a toujours assez, d’autant plus que l’économie est une ressource à notre portée : elle peut même, avec le secours de la frugalité, convertir la pauvreté en richesse. Accoutumons-nous à éloigner de nous le faste, et recherchons en toutes choses l’usage, et non point l’éclat extérieur. Ne mangeons que pour apaiser la faim ; ne buvons que pour la soif ; que nos appétits charnels n’aillent pas au delà du vœu de la nature ; apprenons à nous servir de nos jambes pour marcher, et dans tout ce qui a rapport à notre vêtement et à notre subsistance, ne consultons pas les nouvelles modes, mais conformons-nous aux mœurs de nos ancêtres : Apprenons à devenir chaque jour plus continents ; à bannir le luxe, à dompter la gourmandise, à surmonter la colère, à envisager la pauvreté d’un œil calme, à pratiquer la frugalité, quand même nous aurions de la honte à satisfaire aux besoins naturels par des moyens peu coûteux ! enfin à ces folles espérances, à ces vœux désordonnés qui s’élancent dans l’avenir, sachons imposer d’insurmontables limites, et accoutumons-nous à attendre nos richesses de nous, plutôt que de la fortune. On ne pourra jamais, je dois le reconnaître, si bien prévenir les variables et injustes caprices du sort, qu’on n’ait encore à essuyer bien des tourmentes quand on a beaucoup de vaisseaux en mer. Il faut concentrer son avoir sur un petit espace, pour que les traits de la fortune tombent à côté.

Il est parfois arrivé que les exils et d’autres catastrophes ont eu l’effet de remèdes salutaires ; et de légères disgrâces ont guéri de grands maux, alors qu’un esprit rebelle aux préceptes n’était pas susceptible d’un traitement plus doux. Mais pourquoi ces adversités ne lui seraient-elles pas utiles ? car si