Page:Sénèque - De la vie heureuse.djvu/28

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suivre ; c’est elle qu’observe, elle que consulte la raison. C’est donc une même chose que vivre heureux et vivre selon la nature. Or voici comment il faut l’entendre : nous devons conserver les qualités physiques et les avantages naturels avec soin et sans inquiétude, comme des objets prêtés pour un jour et fugitifs ; nous ne devons pas nous mettre sous leur dépendance, ni nous assujettir à ce qui nous est étranger, et il faut que les biens corporels et adventices soient placés dans notre vie au rang que tiennent dans les camps les auxiliaires et les troupes légères. Que tout cela serve et ne commande point ; à ce titre seulement l’âme en tirera profit. Que l’homme de cœur soit incorruptible aux choses extérieures, touché d’admiration seulement pour son bien propre, plein de confiance, également prêt à l’une et l’autre fortune, et artisan de sa vie. Que l’assurance chez lui n’aille pas sans la science, ni la science sans la fermeté ; que ses résolutions tiennent, une fois prises, et que dans ses décrets il ne se glisse pas de rature. On conçoit, sans que je l’ajoute, quelle paix, quelle concordance régnera dans un tel esprit, et que tous ses actes seront empreints d’une dignité bienveillante. Chez lui la véritable raison sera greffée sur les sens, et y