Page:Sénèque - De la vie heureuse.djvu/52

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utiles soins, et renonce à une foule de devoirs ; ainsi le sectateur du plaisir lui sacrifie tout, ne tient nul compte du premier des biens, la liberté, qu’il aliène aux plus vils penchants : il se vend au plaisir, quand il pense l’acheter.


XV. « Cependant, qui empêche que la vertu et le plaisir ne se confondent, et ne réalisent le souverain bien, de telle sorte que l’honnête et l’agréable soient une même chose ? » C’est que l’honnête seul peut faire partie de l’honnête, et que le souverain bien n’aurait pas toute sa pureté s’il admettait en soi quelque alliage de moindre prix. La joie même qui naît de la vertu, quoique étant un bien, ne fait point partie du bien absolu ; non plus que le calme et la sérénité, quelque beaux qu’en soient les motifs. Car ces choses ne sont des biens que comme conséquences du bien suprême, non comme compléments. Mais quiconque associe la vertu et le plaisir, sans même leur faire part égale, émousse par la fragilité de l’un tout ce que l’autre a de vigueur ; cette liberté, qui n’est invincible qu’autant qu’elle ne voit rien de plus précieux qu’elle-même, il la met sous le joug. Car il commence dès lors à avoir besoin de la fortune, et c’est là