Page:Sénèque - Tragédies de Sénèque, trad Greslou, ed 1863.djvu/397

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impétueux et violents qui vous dominent ? Malgré votre silence, le trouble de votre cœur éclate sur votre visage. Quoi que ce puisse être, attendez, et ne précipitez rien. Le temps est souvent un remède aux maux que la raison ne peut guérir.

Clytemnestre - Mes tourments ne comportent aucun retard. Le feu brûle mon cœur et mes entrailles. La crainte m'aiguillonne autant que le dépit. D'un côté, je suis poussée par la jalousie; de l'autre, subjuguée par une passion honteuse à laquelle je n'ose me livrer. Entre ces deux flammes qui me consument également, ma pudeur affaiblie, sans résistance, et déjà vaincue, se révolte encore. Je suis prise entre deux forces contraires, comme une mer que le vent et le flux se disputent, et qui demeure immobile, ne sachant à laquelle de ces puissances elle doit obéir. Aussi j'ai abandonné le gouvernail, et je me laisse aller où la jalousie, le dépit, l'espérance me conduiront. Je livre mon navire au caprice des flots. Quand le cœur est égaré, le meilleur guide est le hasard.

La nourrice - Il n'y a qu'une aveugle témérité qui puisse choisir un tel guide.

Clytemnestre - Au comble du malheur, quels dangers a-t-on à craindre?

La nourrice - Montrez-vous calme: tout est sauvé, et votre faute reste à couvert.

Clytemnestre -