Page:Sénèque - Tragédies de Sénèque, trad Greslou, ed 1863.djvu/403

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prospérité nous éblouit. Dans quel appareil il va se rendre au milieu de ses maîtresses! Au-dessus de toutes s'élève la prêtresse du dieu des oracles, captive qui règne en souveraine sur le coeur d'un roi. Souffrirez-vous qu'elle partage votre lit nuptial ? Le partager? Elle n'y consentira pas ; et vous subirez le plus grand des malheurs pour une femme légitime, celui de voir, à votre place, une concubine gouverner publiquement le palais de votre époux. Car l'hymen ne se partage pas plus que le trône.

Clytemnestre - Égisthe, pourquoi veux-tu m'entraîner encore dans le précipice, et attiser le feu de ma colère qui commence à s'apaiser? Le vainqueur s'est permis quelque chose avec ses captives : c'est un écart qui ne mérite pas l'attention d'une épouse et d'une reine. La loi de l'hymen n'est pas la même pour les rois et pour les particuliers. Que dis-je? le souvenir de ma honteuse faiblesse ne me permet guère d'imposer à mon époux des lois sévères. On doit être prompt à pardonner, quand on a besoin soi-même de pardon.

Égisthe - Eh bien, pardonnez-vous mutuellement vos fautes. Ignorez-vous donc les privilèges des rois? Sont-ils donc nouveaux? Juges impitoyables pour nous, mais indulgents pour eux-mêmes, ils regardent comme la plus belle prérogative du trône le droit exclusif de faire tout ce qu'ils défendent aux autres.

Clytemnestre - Hélène a reçu son pardon; elle revient