Page:Sénèque - Tragédies de Sénèque, trad Greslou, ed 1863.djvu/422

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ils voudraient m'accabler de plus de maux, ils ne le pourraient pas. Le Sort a épuisé sur moi sa puissance. Me reste-t-il une patrie, un père, une soeur? Les tombeaux et les autels sont abreuvés de mon sang. Que sont devenus mes frères au comble de la prospérité? ils ont péri. Le palais du vieux Priam est désert, et de tant d'époux qui l'habitaient jadis, il n'y a qu'Hélène qui ne soit pas veuve. Hécube, la mère de tant de rois, et la reine des Troyens, cette femme qui mit au monde le flambeau qui devait consumer son empire, par une déplorable métamorphose, a été changée en une bête féroce, et, dans sa fureur, elle aboie sur les ruines de son palais, survivant ainsi à Troie, à Priam, à Hector et à elle-même.

Le Chœur - La prêtresse d'Apollon s'est tue soudain ; la pâleur couvre son visage, et un tremblement convulsif agite tout son corps. Ses bandelettes et ses cheveux se dressent sur sa tête. Des murmures étouffés résonnent dans son sein haletant. Sa vue se trouble, ses yeux tantôt se retournent comme pour s'enfoncer dans leurs orbites, tantôt ils sont hagards et cruels. La voilà qui lève sa tète plus haut que de coutume, et marche d'un air imposant. Elle fait des efforts pour parler. Elle va enfin ouvrir la bouche : elle a vaincu la résistance du dieu qui l'inspire.

Cassandre -