ses intérêts et plaidait sa cause aussi vivement que « si elle
avait eu une pension » pour cela, dans le temps où son mariage avec un duc d’Oldenbourg irritait contre elle l’orgueil de
la princesse. Ce n’était pas faire trop mal sa cour à la bonne
Tarente. Ce soin qu’elles avaient toutes deux de flatter mutuellement leur amour maternel était entre elles un grand lien. Il
y avait pour madame de Sévigné d’autres raisons encore de
tenir à ces affectueuses relations ; la moindre était sans doute
que « cette faveur la faisait honorer de ses paysans. » La première de toutes devait être la grande amitié que la princesse
lui témoignait, prodigue pour elle de mille attentions, jusqu’à
la fournir d’essences miraculeuses et de drogues, dont, avec
sa passion pour la médecine, elle avait un riche assortiment.
Madame de Sévigné comptait pour quelque chose aussi la
communication qu’elle recevait par elle de ces lettres de
Madame écrites avec une liberté si germanique. La princesse
de Tarente les lui traduisait de l’allemand. Quelle mine féconde
de nouvelles de la cour à transmettre à madame de Grignan !
Enfin un précieux avantage que madame de Sévigné pouvait se
promettre de recueillir de cette amitié, c’était un adoucissement aux charges que les malheurs de la Bretagne faisaient
peser sur elle, comme sur tout le monde. « Madame de Tarente, écrivait-elle à sa fille, le 27 octobre 1675, nous a sauvés
des contributions. » Lorsque Pommereuil fut arrivé, avec ses
huit ou dix mille hommes, la princesse espérait qu’elle serait
soulagée, grâce à la protection de Monsieur et de Madame ; et
madame de Sévigné disait : « Nous nous sauverons, si la princesse se sauve[1]. » Mais celle-ci était desservie par madame de
Monaco, surintendante de la maison de Madame, jalouse du
crédit de cette tante. Il paraît qu’on prit peu de soin de la
préserver de la ruine commune, et qu’elle n’obtint pas les
exemptions dont elle s’était flattée[2]. Son affliction était donc
égale à celle de madame de Sévigné, et elle maudissait avec
elle ces troupes qui dévoraient la province.
Madame de Sévigné, lorsqu’elle retourna aux Rochers, en 1680, et pendant un long séjour qu’elle y fit en 1684