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pèce. Je ne parle point encore de mes projets ; il me semble que je serai libre à la fin de l’été : il y a encore bien du temps ; nous prendrons nos mesures ensemble[1], ayant le même dessein de nous retrouver.

1229. DE MADAME DE SÈVIGNÉ ET DE LA JEUNE MARQUISE DE SÉVIGNÉ A MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, mercredi 2è octobre.

DE MADAME DE SÉVIGNÉ.

JE crois, ma chère fille, qu’à l’heure qu’il est vous n’avez plus votre beau Comtat. La première chose que le Roi fait avec ce nouveau pape, qui est entièrement selon son cœur et au delà de nos espérances[2]1, c’est de lui rendre ce beau morceau[3], qui étoit si fort à votre bienséance : cette pensée fait la douleur de mon cœur. Voilà un petit détail de notre abbé Bigorre, que vous ne serez point fâchée de voir. M. de Chaulnes est trop heureux : on ne peut plus lui disputer d’être l’homme du monde qui fait le mieux un pape. Celui-ci est si bon, que nous n’osions l’espérer ; il est Vénitien : c’est celui qui répondit le 4è d’octobre au compliment de Monsieur l'ambas-

  1. 36. « Nous prendrons ensemble nos mesures. » (Édition de 1784.)
  2. Lettre 1229. 1. La Gazette du 22 octobre, en annonçant l’élection du pape Alexandre VIII, fait de lui cet éloge : Cette élection a cause une joie générale, chacun étant persuadé que le siège de saint Pierre ne pouvoit être rempli par un plus digne sujet, ni plus capable de procurer à la chrétienté tous les avantages qu’elle peut espérer d’un pape d’une sagesse et d’une expérience consommée. »
  3. 2. « Cet admirable morceau. » (Édition de 1754.) -- Aussitôt que le pape eut été élu, le duc de Chaulnes lui dit que le Roi restituait Avignon au saint-siége. Voyez le Journal de Dangeau, au 18 octobre 1689.