Page:Sévigné - Lettres choisies, Didot, 1846.djvu/614

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niversité de Paris (vous avez vu le charmant ouvrage de Despréaux), et on ne voudra pas seulement l’entendre, accompagnée de ses {pièces) justificatives ! quoi ! deux et deux ne feront plus quatre ![1] Une gratification donnée par le maréchal de la Meilleraie, de cent écus en deux ans, qui n’a jamais été sur aucun état de pension, et qu’on ne savait pas, fera un crime de n’être pas continuée, quand on dit : « Monsieur, il faudra voir aux états prochains ; si je m’étais trompé, cela serait aisé à réparer. » Car pour celle du mort rayée et donnée aux états de 71, Coëtlogon n’en disconvient pas. Peut-on avoir tort quand on fait voir clairement toutes ces choses[2] ? Ah ! si M. le chevalier avait une telle cause en main, avec ce beau sans ; bouillant qui fait la goutte et les héros, il la saurait bien soutenir d’une autre manière que je fais ! Mais peut-on, avec un si bon esprit, fermer les yeux et la porte à cette pauvre vérité ? Non vraiment, ma chère comtesse, ce n’est point sur ce chapitre que M. le duc de Chaulnes a tort ; c’est son chef-d’œuvre d’amitié ; il eu a rempli tous les devoirs, et au delà : c’est avec nous qu’il a tort, et qu’il a un procédé qui m’est entièrement incompréhensible : telle est la misère des hommes ; tout est à facettes, tout est vrai, c’est le monde. Ce bon duc de Chaulnes m’a encore écrit de Toulon : il ne cesse de penser à moi, sans y avoir songé un seul moment pendant huit jours qu’il a été à Paris ; pas un mot au roi de cette députation tant de fois promise, et avec tant d’amitié et de raison de croire qu’il en faisait son affaire ; pas un mot à M. de Croissi, dont il emmenait le fils, et qui aurait nommé votre frère : il dit une parole en l’air à M. de Lavardin : mais croyait-il qu’il eût plus de pouvoir que lui pour faire un député ? Nous étions persuadés que c’était après en avoir dit un mot au roi. Enfin il part, il apprend que Lavardin ne tiendra point les états ; il fallait donc écrire. Il va à Grignan, vous lui en parlez ; il semble qu’il ait quelque envie d’écrire, mais cela ne sort point ; il m’écrit de Grignan et de Toulon, il ne m’en dit pas un mot. Madame de Chaulnes en doit parler à M. de Croissi, mais ce sera trop tard : la place sera prise par M. de Coëtlogon. Pour M. le maréchal d’Estrées, il ne s’est

  1. Voyez l’arrêt burlesque donné en la grand’chambre du Parnasse en faveur des maîtres ès-arts, pour le maintien de la doctrine d’Aristote. Œuvres de Boileau.
  2. Ce passage est relatif à l’affaire de M. d’Harouïs, trésorier des états de Bretagne, allié de madame de Sévigné. Elle justifie ici le duc de Chaulnes aux veux de la famille de Grignan, qui lui donnait tort.