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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX


tromper et qu’il s’en tiendrait là ; d’ailleurs, en eussent-ils dit l’un et l’autre davantage, à moins qu’on ne m’eût enfermée, rien au monde n’eût été assez violent pour m’empêcher d’aller au rendez-vous prochain ; il me devenait trop essentiel de m’éclaircir avec mon amant, pour que rien au monde pût me priver de l’aller voir.

À l’égard de mon père, il était toujours le même, m’idolâtrant, ne soupçonnant aucun de mes torts, et ne me gênant jamais sur rien. Qu’il est cruel d’avoir à tromper de tels parents, et que les remords qui en naissent sèment d’épines sur les plaisirs qu’on achète aux dépens de trahisons de cette espèce ! Funeste exemple, cruelle passion, puissiez-vous garantir de mes erreurs celles qui seront dans le même cas que moi, et puissent les peines que m’ont coûtées mes criminels plaisirs, les arrêter au moins sur le bord de l’abîme, si elles apprennent jamais ma déplorable histoire.

Le jour fatal arrive enfin, je prends Julie, et m’esquive comme à mon ordinaire, je la laisse chez ma tante et gagne promptement dans mon fiacre la maison de la Berceil. Je descends… le silence, l’obscurité qui règnent dans cette maison, m’alarment étonnamment d’abord… aucun visage connu ne se présente à moi, il ne paraît