Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/345

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colons qui les tiennent dans l’esclavage, ont de trop grands torts avec eux pour nous en parler vrai.

La première de nos injustices est de donner aux Africains un caractère général. Ils ont la même couleur ; ils ont beaucoup de sensibilité : voilà tout ce qu’ils ont de commun. Les nez écrasés même & les grosses lèvres, ne sont pas plus les attributs des noirs que des blancs. Il y a chez ceux-ci des Lapons, des Tartares, des Esquimaus, des Mogols, des Chinois, qui ont ces deux difformités. Il y a chez les Africains des nations entières où la taille & le visage ont les plus belles proportions. Il n’est pas plus vrai que les nègres en général soient paresseux, frippons, menteurs, dissimulés ; ces qualités sont de l’esclavage & non de la nature.

Le vaste continent de l’Afrique est couvert d’une multitude de peuples. Les gouvernements, les productions, les religions qui varient dans ces contrées immenses, ont nécessairement varié les caractères. Ici vous rencontrerez des Républicains qui ont la franchise, le courage, l’esprit de justice que donne la liberté. Là, vous verrez des nègres indépendants, qui vivent sans chefs & sans loix, aussi féroces & aussi sauvages que les Iro-