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330 NOUVEAUX LUNDIS.

est pas un pour lui : on croirait que ce style savant et dont chaque mot a sa valeur de ton est des plus tra- vaillés, il est improvisé et facile; il coule de source.

le sais tout ce qu’o'n peut dire, tout ce que peut-être j’ai dit moi-même, sur cette peinture écrite. ll y a du trop; il y a des jours où la couleur est disproportion- née aux choses et où elle déborde. Le bon Homère sommeille quelquefois. ll peut arriver en certains cas que Fhabitude de peindre donne le change non-seule- ment à la critique, mais encore au sujet. C’est ainsi qu'un jour, étant allé à Fontainebleau pour assister aux funérailles du peintre Decamps, Théophile Gantier, peintre lui-même, s’oublia un peu; il fut comme saisi du paysage, et le deuil f‍it place insensiblement sous sa plume à une charmante inatiilée de soleil dans la forêt. D’artis1e à artiste, cette oraison funèbre, après tout, en vaut une autre. La fête de la nature autour d’une tombe qui s’ouvre a aussi sa philosophie vraie : c'est celle du poète qui sait qu'il chante sous la feuillée comme l’0i— seau et qu’il n’a à lui que quelques printemps.

1V.

- Je m’attarde, je m'attende, et le Capitaine Fracasse

»m’appelle.

Et je n’ai pas parlé des ballets-pamotnimes de Théo- phile Gantier, à commencer par Gisclle : singulier début au théâtre pour un homme de style qu'un genre muet, une composition ou l'on danse et où l'on ne (lit mot.

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