Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/215

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ville, je commence par tomber dans la boutique d’un perruquier, mon cheval à la porte, moi dans l’intérieur. Comme à l’ordinaire, je ne me fais pas le moindre mal. Je me ramasse plus vite que mon cheval. Je regarde cet événement comme d’un bon augure, et je remonte sur ma bête, qui n’avait pas de mal non plus.

« J’arrive au quartier. Je vais trouver le quartier-maître Boursier, qui me reçoit et m’embrasse avec sa gaîté et sa franchise ordinaires.

Il me dit que les lettres du général ne sont pas encore arrivées, mais que je suis bien bon pour me présenter et me recommander moi-même, et il me mène chez le commandant du dépôt, nommé Dupré. C’est un officier de l’ancien régime, qui ressemble à notre ami M. de la Dominière. Je lui dis qui je suis, d’où je viens. Il m’embrasse aussi ; il m’invite à souper ; il m’autorise à ne point aller coucher au quartier, et me dit qu’il espère que je vivrai avec les officiers. En effet, je dîne tous les jours avec lui et avec eux…….

« Je passe mes journées chez le quartier-maître, et je t’écris de son bureau. Nous avons à notre table un autre jeune homme de la conscription, simple chasseur comme moi. Il est d’une des premières familles de Liége et joue du violon comme Guénin ou Maëstrino. En outre, il est aimable et spirituel, et le commandant l’aime beaucoup, car il joue lui-même de la flûte, adore la musique et fait grand cas des