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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/313

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vous enrhumer. « Personne ne pense à moi, personne ne sait où je suis ; si je veux passer la nuit sur cette pierre, il ne tient qu’à moi. Mais c’est là le bonheur suprême, et je ne conçois pas que cela s’appelle une punition. »

Puis je pensai que bientôt je serais avec ma mère, et je fis mes adieux tendres, mais joyeux, à la campagne, aux merles, aux buissons, aux étoiles, aux grands arbres. J’aimais la campagne ; mais je ne savais pas que je ne pourrais jamais vivre ailleurs, je croyais qu’avec ma mère le paradis serait partout. Je me réjouissais de l’idée que je lui serais utile, que ma force physique la dispenserait de toute fatigue. « C’est moi qui porterai son bois, qui ferai son feu, son lit, me disais-je. Nous n’aurons point de domestiques, point d’esclaves tyrans ; nous nous appartiendrons, nous aurons enfin la liberté du pauvre. »

J’étais dans une situation d’esprit vraiment délicieuse, mais Rose ne m’avait pas si bien oubliée que je le pensais. Elle me cherchait et s’inquiétait, quand je rentrai à la maison ; mais, en voyant l’énorme balafre que j’avais au visage, comme elle m’avait vue travailler pour la mère Blin, elle, qui avait un bon cœur, ne songea point à me gronder. D’ailleurs, depuis que j’étais en pénitence, elle était fort douce et même triste.

Le lendemain, elle m’éveilla de bon