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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/523

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sort futur en religion. Je veux bien obéir, mais je sens aussi le besoin de commander. J’aime l’approbation, la critique m’irrite, la moquerie m’exaspère. Je n’ai ni indulgence instinctive ni patience naturelle. Pour vaincre tout cela, pour m’empêcher de tomber dans le mal cent fois par jour, il me faut une continuelle tension de ma volonté. Enfin, si je surnage au-dessus de l’abîme de mes passions, j’aurai bien du mal, et il me faudra du Ciel une bien grande assistance.

Là-dessus elle pleurait et se frappait la poitrine. J’étais forcée de la consoler, moi qui me sentais un atome auprès d’elle. « Il est possible, lui disais-je, que je n’aie pas les mêmes défauts que toi, mais j’en ai d’autres, et je n’ai pas tes qualités. À brebis tondue, Dieu ménage le vent. Comme je n’ai pas ta force, les vives sensations me sont épargnées. Je n’ai pas de mérite à être humble, puisque par caractère, par position sociale peut-être, je méprise beaucoup de choses qu’on estime dans le monde. Je ne connais pas le plaisir qu’on goûte à la louange, ni ma personne ni mon esprit ne sont remarquables. Peut-être serais-je vaine si j’avais ta beauté et tes facultés : si je n’ai pas le goût du commandement, c’est que je n’aurais pas la persévérance de gouverner quoi que ce soit. Enfin, rappelle-toi que les plus grands saints sont ceux qui ont eu le plus de peine à le devenir. »

— C’est vrai ! s’écriait-elle. Il y a d