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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/568

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sentais pas propre à ce rôle. « Vous voulez que je sois aimée de tout le monde ici, lui avais-je dit : eh bien, je me connais assez pour vous dire que je ne pourrai pas me faire aimer sans aimer moi-même, et que je ne serai jamais capable de dire à une personne aimée : « Faites-vous dévote, mon amitié est à ce prix. » Non, je mentirais. Je ne sais pas obséder, persécuter, pas même insister, je suis trop faible. — Je ne demande rien de semblable, m’avait répondu l’indulgent directeur ; prêcher, obséder serait de mauvais goût à votre âge. Soyez pieuse et heureuse, c’est tout ce que je vous demande, votre exemple prêchera mieux que tous les discours que vous pourriez faire. »

Il avait eu raison d’une certaine manière, mon excellent vieux ami. Il est certain que l’on était devenu meilleur autour de moi ; mais la religion ainsi prêchée par la gaîté avait donné bien de la force à la vivacité des esprits, et je ne sais pas si c’était un moyen très sûr pour persister dans le catholicisme.

J’y persistais avec confiance, j’y aurais persisté, je crois, si je n’eusse pas quitté le couvent ; mais il fallut le quitter, il fallut cacher à ma grand’mère, qui en aurait mortellement souffert, le regret mortel que j’avais de me séparer des nombreux et charmans objets de ma tendresse : mon cœur fut brisé. Je ne pleurai pourtant pas, car j’eus un mois pour me préparer à cette sé