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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/614

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ion en selle et la souplesse de leurs membres, peuvent, en effet, tenir beaucoup plus longtemps que les hommes.

Je cédais cependant quelquefois Colette à mon petit page, afin de le reposer, par la douceur de son allure, et je montais ou la vieille jument normande qui avait sauvé la vie à mon père dans plus d’une bataille par son intelligence et la fidélité de ses mouvemens, ou le terrible général Pepe, qui avait des coups de reins formidables, mais je n’en étais pas plus lasse au retour, et je rentrais beaucoup plus éveillée et active que je n’étais partie.

C’est grâce à ce mouvement salutaire que je sentis tout à coup ma résolution de m’instruire cesser d’être un devoir pénible et devenir un attrait tout-puissant par lui-même. D’abord, sous le coup du chagrin et de l’inquiétude, j’avais essayé de tromper les longues heures que je passais auprès de ma malade, en lisant des romans de Florian, de Mme de Genlis et de Van der Velde. Ces derniers me parurent charmans ; mais ces lectures, entrecoupées par les soins et les anxiétés que m’imposait ma situation de garde-malade, ne laissèrent presque rien dans mon esprit, et à mesure que la crainte de la mort s’éloignait pour faire place en moi à une mélancolique et tendre habitude de soins quasi-maternels, je revins à des lectures plus sérieuses, qui bientôt m’attachèrent passionnément.