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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/700

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— Alors, pourquoi crie-t-on au scandale autour de nous ?

— Le fait de certaines imbécillités ne prouve rien. Mais cependant il ne faudrait pas pousser à l’extrême l’esprit d’indépendance que, dans cette occasion-ci, je partage avec vous. Vous êtes appelée à vivre dans le monde ; si telle ou telle chose innocente en soi-même, et que je juge sans inconvénient, venait à blesser les idées de votre entourage, il faudrait bien y renoncer.

— Cela dépend, grand homme. Les choses indifférentes en elles-mêmes doivent être sacrifiées au savoir-vivre, comme disait toujours ma pauvre bonne-maman quand elle m’enseignait, et, par le savoir-vivre, elle entendait l’affection, l’obligeance, l’esprit de famille ou de charité. Mais les choses qui sont essentiellement bonnes, peut-on et doit-on s’en abstenir parce qu’elles sont méconnues et mal interprétées ? Pour sauver l’honneur d’un parent ou d’un ami, on peut être forcé d’exposer le sien à des soupçons. Pour lui sauver la vie, on peut être condamné à mentir. Pour avoir assisté un malheureux écrasé à tort ou à raison sous le blâme public, il arrive que l’intolérance vous rend solidaire de la réprobation qui pèse sur lui. Je vois dans l’exercice de la charité chrétienne, qui est la première de toutes les vertus, mille devoirs qui doivent scandaliser le monde. Donc, quand Jésus a dit : « Si l’un de vous scandalise un de ces petits qui croient