Page:Sand - Lettres a Alfred de Musset et a Sainte-Beuve.djvu/35

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devrait le faire taire, et vous dire : « Aime cette pauvre femme ; tu es bien sûr de ne pas trop l’aimer, à présent. Que crains-tu ? Elle ne sera pas exigeante, l’infortunée ! Celui des deux qui aime le moins est celui qui souffre le moins. C’est le moment de l’aimer ou jamais. »

Suite inédite ; « Ah ! il a tort, n’est-ce pas, mon Dieu, il a tort de me quitter à présent que mon âme est purifiée, et que, pour la première fois, une volonté sévère s’est arrêtée en moi. Est-ce une volonté ? Je ne sais pas. C’est mieux ; car que sais-je de tous leurs raisonnements humains et de leurs principes sociaux ? Je sens, voilà tout. Je l’aime. Cet amour pourrait me conduire au bout du monde. Mais personne n’en veut, et ma flamme s’éteindra comme un holocauste inutile !… »

Un peu plus loin, elle s’adresse au poète : « Et toi, Poète, belle fleur, j’ai voulu boire ta rosée. Elle m’a enivrée, elle m’a empoisonnée, et, dans un jour de colère, j’ai cherché un contrepoison qui m’a achevée. Tu étais trop suave et trop subtil, mon cher parfum, pour ne pas t’évaporer chaque fois que mes lèvres t’aspiraient. Les beaux arbrisseaux de l’Inde et de la Chine, pliant sur une faible tige