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la jeune fille.

Il s’agit, en l’aventure, d’un pharmacien et d’une jeune fille pauvre qui ne se connaissaient point.

La jeune fille s’appelait Juliette et était fort malheureuse ; cela arrive parfois aux jolies personnes en âge d’être pourvues et qui rêvent d’amour, encore qu’elles soient obligées de vivre de prose. Et la belle Juliette était loin d’être fortunée ; aussi, les soins du ménage l’absorbaient-ils presque entièrement. Sauf ses bottes, qu’elle laissait confectionner par un expert cordonnier, elle devenait tour à tour sa tailleuse, sa chapeautière, sa lingère, sa repasseuse et sa servante. Juliette confiait ces secrets méritoires, chaque soir, aux étoiles, non sans pousser un gros soupir. Ce n’était point qu’elle regrettât particulièrement son dur labeur, Dieu l’ayant faite courageuse ; mais il lui semblait injuste que le vieux père avec lequel elle vivait appréciât seul des talents si divers, qui ne demandaient qu’à s’étendre encore sur mille autres sujets plus charmants.

Oh ! non ! l’or ne ruisselait pas dans la maisonnette ; mais ce n’était pas une raison pour que le cœur de Juliette fut moins tendre que celui des riches héritières de la contrée, et ce cœur virginal était mûr pour l’amour. En vérité, Juliette attendait un Roméo, mais un Roméo