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les deux bontés.

nerfs, ou obéissent soudainement aux caprices de leur imagination ; ils ont des bontés successives qui se contredisent : quelques-unes sont exagérées, d’autres indignes de leur objet, et ils jouent avec ce grand sentiment comme on s’amuse avec un toutou qu’on renvoie à sa niche après qu’il a exécuté ses tours.

Ainsi, dans Notre Jeunesse, l’exquise vieille, Laure de Roine, au cœur d’or, à la jugeote de linotte, se mêle, à sa façon, de faire le bonheur de tout le monde. Elle s’y emploie avec une témérité bien dangereuse.

— Quand j’ai commencé une gaffe, dit-elle, il faut que j’aille jusqu’au bout, c’est une manie : d’ailleurs, j’ai le pressentiment que ce n’est pas une gaffe.

Comme l’excellente femme n’y voit pas plus loin que le bout de son nez, parce que c’est une emballée, tout de premier jet, — en un instant elle sacrifie le repos d’une famille, la tranquillité d’un vieux père, et l’harmonie d’un ménage, au bonheur d’une enfant qu’elle connaît à peine, et se frotte les mains en songeant que sa toquade est couronnée d’un plein succès.

Au théâtre, c’est charmant. Mais cette bonté-là ne me donne guère de quiétude, cousine. Que, demain, Laure de Roine ait en tête, ou plutôt dans le cœur, une autre lubie, peut-être