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conclusion et considération plus haute

si nous avons confiance qu’il est disposé à le faire (Rhétorique, 1,9). » Ce n’est pas sur une action passagère, mais sur les qualités durables de son auteur, c’est-à-dire sur le caractère dont elle émane, que portent la haine, l’aversion et le mépris. Aussi, dans toutes les langues, les épithètes marquant la perversion morale, les termes d’injure qui la flétrissent, sont bien plus souvent des attributs applicables à l’homme qu’aux actions mêmes dont il se rend coupable. On les applique à son caractère (car c’est à lui qu’incombe véritablement la faute), lorsque ses manifestations extérieures, c’est-à-dire ses actes, ont révélé sa nature particulière et permis de l’apprécier.

Là où est la faute doit être également la responsabilité : et puisque le sentiment de cette responsabilité est l'unique donnée qui nous fasse induire l’existence de la liberté morale, la liberté elle-même doit résider là où la responsabilité réside, à savoir : dans le caractère de l'homme. Cette conclusion est d’autant plus nécessaire que nous sommes persuadés que la liberté ne saurait se trouver dans les actions individuelles, qui s’enchaînent d’après un rigoureux déterminisme une fois que le caractère est donné. Or le caractère, comme il a été montré dans le troisième chapitre, est inné et invariable.