Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/44

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de tous les autres, il eſt vray qu’il n’eſtoit pas poſſible de n’avoir point envie de rire du diſcours de Doraliſe : joint qu’il eſt certains jours qui ſemblent eſtre conſacrez à la joye : & où la moindre choſe fait pancher l’eſprit à la raillerie, & donne du divertiſſement. Cleandre qui eſtoit celuy qui donnoit le plaiſir de la Chaſſe ce jour la, & qui ne pouvoit pas eſtre le Chaſſeur de la Princeſſe Palmis, quoy qu’il fuſt deſja ſon Amant, comme nous l’avons sçeû depuis ; ne le voulut eſtre de Perſonne : pretextant la choſe de ce qu’il vouloit donner ordre à tout : de ſorte qu’il alloit tantoſt à l’une & tantoſt à l’autre. Cette Chaſſe ſe fit dans un grand Parc, que l’on peut preſques nommer une petite Foreſt, tant il eſt vray qu’il eſt d’une vaſte eſtendué ; que ſes Arbres ſont eſpais ; & que ſes routes ſont grandes & larges. Ce Parc eſt pourtant traverſe par un chemin aſſez libre, parce qu’autrement ceux qui veulent aller à Sardis par ce coſté là, feroient un fort grand détour : ſi bien qu’il y a deux portes aux deux bouts du Parc, deſtinées à donner paſſage à ceux qui vont & viennent. je ne m’amuſeray point, Madame, à vous décrire cette Chaſſe, ny à vous dire ſi les Chiens chaſſerent bien ; ſi le Cerf ruſa ; ſi le ſon des Cors eſtoit agreable ; ſi les Veneurs furent touſjours à veuë de la Chaſſe ; & mille autres ſemblables choſes : car outre que je ne m’exprimerois pas en termes propres, ce n’eſt pas de cela dont il s’agit. Joint qu’à dire la verité, les Dames qui vont à de ſemblables lieux, y vont à mon advis autant pour y paroiſtre belles, que pour courre le Cerf : auſſi la Chaſſe eſtoit diſposée de façon, qu’on ne leur donnoit pas un exercice ſi violent : & on ſe contentoit de les faire aller aſſez lentement, en des lieux où par l’adreſſe