Page:Senancour - Rêveries, 1833.djvu/411

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moins c’est de la postérité qu’ils doivent attendre principalement cette justice. Qu’ils sachent même, quand il le faut, arriver jusqu’au dernier jour sans apprendre si l’ouvrage auquel ils s’attachèrent doit leur survivre, malgré la difficile épreuve que lui réserve peut-être une génération subjuguée par des intérêts frivoles, par les cris de l’intrigue, par l’opiniâtreté des partis. C’est assez que cette disposition du siècle influe puissamment sur les artistes littéraires qui avant tout veulent recevoir des louanges, et que ce désir immodéré contribue à prolonger la funeste disposition du siècle.

Constamment occupés de l’amélioration du sort des hommes, les vrais écrivains choisiront des sujets sérieux. Ils écriront sur la morale, sur l’hygiène et la politique, sur les usages et les cultes des vieux peuples. Il conviendra dès-lors de ne pas ignorer l’astronomie, la géologie, les sciences exactes, d’observer souvent les phénomènes qui peuvent déterminer nos affections, et surtout de pénétrer dans les profondeurs métaphysiques où se trouve le fondement des notions humaines, depuis les simples règles des beaux-arts jusqu’aux plus hautes conceptions religieuses.

Est-il une aussi grande différence qu’on l’assure entre la sagesse regardée comme profane, et une doctrine expressément relative aux choses divines ? Les disciples sincères de l’une et de l’autre ont le même but. Les torts, les attentats reprochés à la philosophie sont-ils bien d’elle ?

Si vous dites aux soutiens ardens et rarement désintéressés d’un parti qui jamais n’ignora le pouvoir de l’or, si vous leur objectez que l’œuvre du christianisme se reconnaît aux excès fanatiques qu’il n’a pas été possible de déguiser dans l’histoire, on vous répondra que les pontifes