Page:Senancour - Rêveries, 1833.djvu/96

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préférence particulière, il doit d’abord apprendre à les discerner.

L’étendue des réflexions substitue en plusieurs rencontres une indifférence acquise à l’indifférence première, ou le calme de la volonté à l’ancien calme du cœur, à l’insouciance de l’homme que peu de choses affectaient, parce qu’il les ignorait toutes. Alors chaque impression pourra être réprimée sans trop s’affaiblir, et souvent un coup d’œil prompt et néanmoins circonspect donnera plus de facilité pour resserrer les rapports désirables.

Ce qui nous causera le moins de tort sera presque toujours ce qu’il y aura de moins étranger à nos affections ordinaires. Comme il conviendrait dans la cité que tous les hommes devinssent presque semblables, il faut aussi que chaque homme se rapproche de lui-même. Préférons, lorsque cela dépendra de nous, les sensations les moins inconstantes ; nous serons sur la voie du bonheur. Choisissons pour un peuple les formes sociales les plus naturelles, les coutumes qui, sans exclure la diversité, pourraient suffire à presque tous les hommes, et n’être trop sévères pour aucune famille. Rendons presque invariables ces bornes universellement adoptées ; nous aurons de vraies institutions.

Mais dans une vie assujétie, défions-nous d’un