Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1873, tome 10.djvu/122

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mais nos soupçons n’en continuent pas moins à se porter sûr vous.

PREMIER SEIGNEUR. — Plaise à Votre Majesté, les légions romaines, toutes venues des Gaules, ont débarqué sur vos côtes, avec un renfort de gentilshommes romains envoyé par le Sénat.

CYMBELINE. — Ah ! que j’aurais besoin des conseils de mon fils et de la reine ! tant d’affaires me font tourner la tête.

PREMIER SEIGNEUR. — Mon bon Suzerain, les forces qui sont à votre disposition sont plus que suffisantes pour affronter celles qui vous sont annoncées : qu’il en vienne d’autres, vous êtes prêt à les affronter aussi : tout ce que réclame la situation, c’est de mettre en mouvement ces forces, qui ne demandent qu’à marcher.

CYMBELINE. — Je vous remercie. Retirons-nous, et prenons les circonstances comme elles nous arrivent. Nous ne craignons pas les ennuis qui peuvent nous venir d’Italie ; mais nous gémissons sur ce qui se passe ici. — Partons ! (Tous sortent excepté Pisanio.)

PISANIO. — Je n’ai pas reçu de lettres de mon maître, depuis que je lui ai écrit qu’Imogène était tuée : c’est étrange : je n’entends pas davantage parler de ma maîtresse qui m’avait promis de me faire passer souvent des nouvelles : je ne sais pas non plus ce qui est arrivé à Cloten ; mais je suis dans l’inquiétude de tous ces côtés à la fois : — les cieux peuvent encore y pourvoir. Je suis honnête dans les choses où je mens ; je ne suis pas sincère afin d’être sincère : les guerres actuelles prouveront aux yeux même du roi que j’aime mon pays, ou j’y périrai. Laissons éclaircir par le temps tous les autres doutes : la fortune conduit au port bien des barques sans pilote. (Il sort.)