Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1873, tome 10.djvu/147

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

PISANIO. — Revenez à vous, ma maîtresse !

CYMBELINE. — S’il en est ainsi, les Dieux ont l’intention de me frapper de mort par excès de joie.

PISANIO. — Comment se trouve ma maîtresse ?

IMOGÈNE. — Oh ! retire-toi de ma vue ; tu me donnas du poison : hors d’ici, dangereux compagnon ! ne viens pas respirer là où sont les princes !

CYMBELINE. — La voix d’Imogène !

PISANIO. — Madame, que les Dieux lancent sur moi leurs foudres sulfureuses, si je ne croyais pas que la boîte que je vous donnai était une chose précieuse : elle me venait de la reine.

CYMBELINE. — Encore du nouveau !

IMOGÈNE. — Cela m’a empoisonné.

CORNÉLIUS. — O Dieux ! J’avais oublié dans la confession de la reine une chose qui atteste ton honnêteté : c Si Pisanio, dit-elle, a donné à sa maîtresse cette composition que je lui donnai comme cordial, elle est servie comme je servirais un rat. s

CYMBELINE..—Qu’est-ce que cela veut dire, Cornélius ?

CORNÉLIUS. — Sire, la reine me sollicitait souvent de lui préparer des poisons, prétendant toujours qu’elle se bornait à tuer pour la satisfaction de sa science de viles créatures, telles que chiens et chats sans valeur : moi, craignant que ses desseins ne fussent plus dangereux, je composai pour elle une certaine drogue qui, prise, aurait pour effet de suspendre le pouvoir de la vie, mais au bout dé peu de temps rendrait tous les instruments de la nature à leurs dues fonctions. — Avez-vous pris de cette drogue ?

IMOGÈNE. — Très-probablement, car j’ai été morte.

BELARIUS. — Mes enfants, voilà la cause de notre erreur,

GUIDERIUS. — C’est Fidèle certainement.

IMOGÈNE. — Pourquoi avez-vous repoussé loin de vous votre épouse ? Imaginez que vous êtes au haut d’un rocher, et maintenant repoussez-moi encore. (Elle l’embrasse.)