Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1873, tome 10.djvu/71

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le fils de Jupiter, si, tu n’étais pas sous tous les autres rapports supérieur à ce que tu es, tu serais trop vil pour être son laquais : tu serais assez honoré, même aux yeux de l’envie, si, pour te récompenser dignement selon tes mérites, on te nommait bourreau en second dans son royaume ; et tu serais encore haï pour cette promotion-là.

CLOTEN. — Le brouillard du midi le pourrisse !

IMOGÈNE. — Il ne pourra jamais courir de plus mauvaise chance que d’être seulement nommé par toi. Son plus pauvre vêtement, pourvu qu’il ait seulement collé à son corps, est plus précieux pour moi que tous les cheveux de ta tête, quand bien même tous ces cheveux devraient se transformer en autant d’hommes tels que foi. — Holà, Pisanio !

Entre PISANIO.

CLOTEN. — Son vêtement ! Le diable soit....

IMOGÈNE. — Va-t’en trouver immédiatement ma femme de chambre Dorothée....

CLOTEN. — Son vêtement !

IMOGÈNE. — Je suis hantée par un sot, effrayée par lui, et courroucée encore davantage. — Va dire à ma femme de chercher un joyau qui, par un trop mauvais.hasard, a glissé de mon bras : il me venait de ton maître ; que je sois maudite, si je voudrais le perdre pour le revenu de n’importe quel roi de l’Europe. Je crois que je l’ai vu ce matin : je suis sûre que la dernière nuit il était à mon bras ; je l’avais baisé : j’espère qu’il n’est pas parti pour informer mon Seigneur que j’accorde mes baisers à autre chose qu’à lui.

PISANIO. — Il ne sera pas perdu.

IMOGÈNE. — Je l’espère bien : va, et cherche-le. (Sort Pisanio.)

CLOTEN. — Vous m’avez insulté : — son plus pauvre vêtement !

IMOGÈNE. — Oui, c’est ce que j’ai dit, Seigneur : si vous voulez m’intenter une action en justice pour cela, prenez des témoins.