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Le Conte de l’Archer.

— Après tout, pensait Tristan dont le vin berçait plus doucement les mélancolies, au point de les assoupir, peut-être m’y habituerai-je avec le temps ? Et puis, la guerre cessant, aurai-je la fortune de revenir sain et sauf. Mon âge sera alors celui qui convient pour ne plus obéir aveuglément à son père. Je parlerai net au mien, morbleu ! Et aussi à cet imbécile de Mathieu Clignebourde, s’il m’allait refuser la main d’Isabeau. Car le pouvoir des parents a des limites, et ce n’est pas sans sagesse que la nature les rend communément, au déclin de la vie, assez faibles d’esprit pour ne plus lutter avec leurs enfants en pleine maturité de raison.

Et comme il s’applaudissait de cette filiale remarque, il aperçut une des sentinelles postées à la partie évasée du plateau, celle que ne bordait aucun arbre, étendant la main gauche comme pour faire faire silence autour d’elle, tandis qu’elle appliquait la droite horizontalement allongée au-dessus de ses yeux pour mieux assurer la netteté de sa vue.

En même temps le capitaine, qui avait également suivi son mouvement, se leva et courut se placer auprès d’elle, tandis que se taisait le bruit des couteaux massifs fouillant les viandes déjà à demi