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Chroniques du Temps passé.

mes reins mon harnais de guerre. N’oubliez pas surtout la recommandation que je vous ai faite, si vous me voyez mortellement atteint. Pour vous, pendant le combat, vous chercherez quelque abri sûr contre l’envolée des flèches. Car il ne convient pas qu’un homme de votre saint état se mêle directement à nos misérables discordes.

— Je resterai près de mon neveu, ne vous en déplaise, répondit frère Étienne.

Et se tournant vers les soldats qui s’apprêtaient à la bataille :

— Je ne saurais mieux, mes compères, vous exciter au devoir qu’en vous rappelant que la vie étant le plus précieux de tous les biens il n’est rien de plus méritoire au monde que de la sacrifier. D’autant qu’il y a gros à parier que, durant que vous allez répandre votre sang pour lui, sans en sauver une seule goutte, votre benoît duc est confortablement installé dans quelqu’un de ses châteaux, faisant bonne chère avec ses gentils-hommes et se disant : Parbleu ! il y en a bien assez là-bas qui se font tuer bêtement à mon service ! Si une telle pensée ne ragaillardit pas votre cœur, c’est que vous êtes indignes de vous dévouer à une si noble cause. Remémorez-vous d’ailleurs l’encourageant exemple de Léonidas et de ses