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Chroniques du Temps passé.

tants de ce récit. Donc tout le monde y demeura coi, ne voyant pas revenir le bon moine qui y avait depuis si longtemps ses habitudes, je veux dire son escarcelle souvent vide, mais son verre toujours plein. Au fond, maître Guillaume fut infiniment vexé.

— Ce frocard, disait-il à qui voulait l’entendre, va refréner, par ses imbéciles sermons, l’ardeur naturelle de mon fils et l’empêcher de conquérir autant de gloire que je lui en destinais. De quoi se mêle ce grand sot de vouloir mener la vie des hommes d’armes à son âge ? Mieux lui eût convenu assurément de rester ici à dire ses patenôtres et à boire notre vin. C’est grand péché à moi d’avoir communiqué à tous ceux qui m’entourent mon goût passionné pour les choses de la guerre et ma belliqueuse humeur. J’aurais dû les garder à mon Tristan seulement.

Maître Mathieu Clignebourde ne disait pas grand’chose, mais peut-être eût-il mieux valu qu’il parlât beaucoup. Il ne pouvait, en effet, être question devant lui de la vive affection de frère Étienne pour le jeune archer, affection qui ne lui avait pas permis de le quitter, sans qu’il partît de quelque grand éclat de rire dont les vitres étaient secouées et dont tremblait le plafond. Mais il était inutile