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Le Conte de l’Archer.

était prisonnier à Péronne, où le Roi l’allait forcer à conclure un traité honteux.

Et telle était l’audace de sa tenue que tout le monde commençait à penser que le petit Tristan fût très en avant dans la faveur du Roi et tînt son père au courant des plus secrètes intentions de Sa Majesté. Quand on faisait part au tanneur de ce doute flatteur, il en rougissait d’aise, mais se gardait bien de le démentir. Tout au contraire, faisait-il l’homme gêné d’avoir laissé surprendre un fait que sa modestie eût voulu cacher. Vous voyez que les bourgeois de cette époque n’étaient pas sensiblement moins vaniteux que ceux d’aujourd’hui.

Et la légende allant bon train, il n’était question que de la fortune de frère Étienne devenu chapelain du Roi au lieu et place du traître La Balue mis en épinette.

Aussi fallait-il voir cet impudent Guillaume Bignolet promettre à tous sa protection, sauf toutefois à Mathieu Clignebourde, et donner à entendre à tous qu’il ne s’octroyait pas une seule faveur dans le royaume dont il ne fût l’intendant. Et, comme les sots n’ont jamais manqué, non plus de ce temps-là qu’aujourd’hui, c’était miracle de voir la petite cour qui s’était faite autour du tanneur et