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Le Conte de l’Archer.

esprit. Lorsque quelque compagnon voulait lui vendre trop cher quelque denrée, il lui en offrait juste moitié prix et trouvait toujours moyen de l’enjôler, en s’enquérant de la place qu’il souhaitait pour son fils ou de quelque autre faveur dont le pauvre diable aurait grande envie. Il ne promettait pas positivement, le rusé, mais laissait entendre la chose comme possible. Et dame Mathurine qui était, comme vous le savez, fort économe, jouait fort bien son rôle dans cette petite comédie dont elle avait tout de suite saisi le côté pratique, avec la finesse féminine que rien ne met en défaut. Elle y dépassait même l’auteur en personne, et il la fallait voir disant aux gens encore hésitants :

— Vous comprenez bien, mon ami, que nous ne pouvons nous engager davantage, car mon mari encourrait la colère du Roi en trahissant les secrets qui lui sont confiés, mais comptez que nous vous obtiendrons bien plus encore que vous ne le pouvez supposer.

Mathieu Clignebourde, quoique sceptique de nature, était quelquefois inquiet, au fond, de ce qu’il voyait de la grande influence de son voisin.

— C’est cela ! pensait-il, il les comblera tous de bienfaits, et moi, il me fera pendre !