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Le Conte de l’Archer.

ainsi publiquement amende honorable, en conspuant ce qu’on vénérait la veille. Mieux vaut se taire assurément, et si j’avais été le fier Sicambre à qui il fut commandé de brûler ce qu’il avait adoré, plutôt que d’obéir à cet ordre impertinent, je me fusse laissé couper en menus morceaux. Mais la vérité est que ce Sicambre-là n’était pas fier du tout. Donc, ô mon fils, malgré que ton Roi soit un méchant drôle, tu lui seras dévoué parfaitement.

Or donc, maintenant que je t’ai dit ton devoir envers ton légitime souverain, le moins est que je t’apprenne tes droits à l’égard de toi-même. Certes j’eusse préféré cent fois, mon Tristan, que tu demeurasses auprès de nous, continuant à t’instruire dans les belles-lettres qui sont la suprême consolation ici-bas ; mais puisque l’humeur belliqueuse de ton père te condamne à une vie différente, saches-en, du moins, les avantages et comment tu en peux tirer le meilleur parti.

C’est un grand privilège aux hommes d’armes de ne pas être empêtrés, leur vie durant, par la continuelle présence de la même femme, comme on l’est fatalement dans le saint état du mariage, et j’estime, pour cela, qu’après la monacale profession leur métier est encore un des meilleurs. Tu