Page:Sima qian chavannes memoires historiques v3.djvu/300

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cuirasses furent couverts de fourreaux[1] ; on les cacha dans les magasins et les arsenaux et on ne s’en servit plus. On porta renversés les boucliers et les lances et on les enveloppa dans des peaux de tigre ; ceux qui avaient commandé et guidé les soldats furent faits seigneurs et on leur donna le surnom de « fourreaux cadenassés »[2]. A la suite de cela, tout l’empire connut que le roi Ou ne se servirait plus des armes de guerre.

« Après que l’armée eût été licenciée, on exécuta le tir à l’arc dans la banlieue ; au (collège de) tir de l’Est, on fit entendre l’ode li cheou ; au (collège de) tir de l’Ouest, on fit entendre l’ode tseou yu[3] ; alors on cessa de pratiquer le tir qui consiste à traverser une cuirasse. Les assistants portaient la robe et le bonnet de cérémonie et avaient la fiche d’ordonnance enfoncée (dans leur ceinture) ; les guerriers braves comme des tigres avaient délié leurs épées. (Le roi Ou) offrit le sacrifice dans la

  1. Si l’on adopte la leçon du Li ki, il faut traduire : « on frotta de sang, pour les consacrer, les chars et les cuirasses. »
  2. C’est la vaillance des capitaines du roi Ou qui avait assuré la victoire et qui avait permis de remettre dans leurs fourreaux les armes de guerre ; à ceux donc de ces capitaines qui furent nommés seigneurs on donna le surnom populaire de « fourreaux cadenassés ».
  3. Ces odes étaient chantées pour marquer la mesure. L’ode tseou yu est la dernière du livre Chao nan dans la section Kouo fong du Che King. Quant à l’ode li cheou, elle est perdue ; li cheou signifie « la tête de renard » ; un passage du traité sur les sacrifices fong et chan explique peut-être à quelle occasion cette ode fut composée : « Vers ce même temps, Tch’ang Hong (cf. n. 254) mit son art magique au service du roi Ling (571-545 av. J.-C.) de la dynastie Tcheou. Les seigneurs ne venaient plus rendre hommage aux Tcheou et la puissance des Tcheou déclinait. Or Tch’ang Hong connaissait ce qui concerne les génies et les dieux ; il fit tirer à l’arc sur une tête de renard ; la tête de renard représentait ceux des seigneurs qui ne venaient pas. Comptant sur l’étrangeté de l’objet, il espérait faire accourir les seigneurs ; mais les seigneurs n’obéirent pas. Alors les gens du pays de Tsin se saisirent de Tch’ang Hong et le tuèrent.