Page:Sima qian chavannes memoires historiques v3.djvu/306

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un air nouveau ; je vous demande la permission de vous le jouer.

Le duc P’ing y consentit. On ordonna alors au maître de musique Kiuen de s’asseoir à côté du maître de musique K’oang, d’attirer à lui son luth et d’en jouer ; avant qu’il eût fini, maître K’oang posa la main sur lui et l’arrêta, disant :

— Ceci est un air de musique d’un royaume détruit ; il ne faut pas l’écouter.

Le duc P’ing dit :

— De quelle manière (cet air) s’est-il produit ? 

Maître K’oang dit :

— C’est le maître de musique Yen qui l’a composé ; il fit pour Tcheou une musique de perdition ; lorsque le roi Ou eût vaincu Tcheou, maître Yen s’enfuit vers l’est et se jeta dans la rivière Pou, C’est pourquoi c’est certainement au bord de la rivière Pou que vous avez dû entendre cet air. Celui qui le premier entend cet air, son royaume sera diminué.

Le duc P’ing dit :

— Les sons que j’aime, je désire les entendre.

Maître Kiuen joua et termina (l’air).

Le duc P’ing dit :

— N’est-il pas des airs plus néfastes encore que celui-ci ?

— Il y en a, dit maître K’oang. — Puis-je les entendre ?, demanda le duc P’ing. Maître Koang dit :

— La vertu et la justice de Votre Altesse sont minces ; vous ne sauriez les entendre. 

Le duc P’ing dit :

— Les sons que j’aime, je désire les entendre.

Maître K’oang, ne pouvant faire autrement, attira à lui son luth et en joua ; dès le premier air, il y eut deux bandes de huit grues noires qui s’abattirent à la porte de la véranda ; au second air, elles allongèrent le cou et crièrent, étendirent les ailes et dansèrent. Le duc P’ing fut très content ; il se leva et porta la santé de maître K’oang ; étant revenu s’asseoir, il demanda :

— N’est-il pas des airs plus néfastes encore que ceux-ci ?

— Il y en a, répondit maître Koang ; ce sont ceux par lesquels autrefois Hoang li réalisa une grande union avec les