Page:Sorel - Corso fleuri.djvu/12

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peu atrophié par la vie de bureau et les habitudes sédentaires, était attendri par l’évocation de sa jeunesse et de son mariage. Tout de suite, il occupa « une situation dans la société ». À Paris, il passait inaperçu ; à Boudoir, il devint un personnage. Son passé administratif et les relations qu’il avait contractées le désignèrent à l’attention ; le ruban rouge qui s’étalait largement à sa boutonnière impressionnait les passants et, lorsqu’on parlait de lui, on faisait suivre son nom de ses titres. Comme tout fonctionnaire, il avait toujours désiré la vie oisive ; néanmoins, pour ne point déchoir dans la considération publique, il lisait régulièrement un journal d’agriculture, auquel il avait prié le cercle de s’abonner. Il devint le grand arbitre du parti modéré ; il avait le dernier mot dans les discussions, encore qu’il parlât fort peu. Le commandant le traitait en camarade, les capitaines le traitaient en supérieur. On lui offrit de se présenter au Conseil municipal, mais Mme Lebardec déclara, dans son salon « que son mari s’était suffisamment fatigué au service de l’État, et qu’il pouvait bien se reposer un peu ».

La maison « des revenants », comme on les surnommait, devint le centre des réjouissances. Pique-niques, promenades, parties de campagne et, surtout, bals, comédies et réunions, tout s’organisait chez eux et l’on ne concevait point de