Page:Sorel - Corso fleuri.djvu/275

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La jeune fille voulait savoir la vérité. Elle resta. Le récit de l’officier l’étonna, puis la charma.

— Une question, Mademoiselle, une seule, à laquelle vous ne refuserez pas de me répondre. Nommez-moi, je vous en conjure, l’auteur des lettres manuscrites que j’ai reçues. Étaient-elles de vous ?

Yvonne courba le front ; ce geste trahissait mieux que les mots le secret de la jeune fille. La robe vaporeuse, la chevelure cendrée qui cachait ha rougeur d’un front noble, les paupières fermées sur un regard ébloui, le sourire intimidé, cette vision n’avait-elle pas hanté les rêves de Louis, depuis sa première jeunesse ?

— Ne parlez pas, supplia-t-il, n’ajoutez rien. Que votre silence, du moins, m’autorise à croire en votre bonté. J’ai tant souffert par la crainte que vous ne me condamniez sans merci ; j’ai été si malheureux de ne pas pouvoir me laver de mon erreur. Vous ne rencontrerez jamais dans le monde plus de reconnaissance que celle que je vous consacre désormais. Ne m’accorderez-vous pas le droit d’emporter de cette unique entrevue votre souvenir ? Vous saurez que de loin un modeste officier sera heureux de suivre en esprit votre sillage à travers la vie, avec quel respect.

Yvonne se taisait ; deux larmes roulèrent le long de ses joues : il lui sembla qu’elle le connaissait depuis son enfance ; elle se sentait confiante auprès de lui ; elle se sentait comprise, elle dit :